Dans l’Haïti des princes décevants, le logement, la santé, la sécurité et l’éducation portent la signature de Balaguer ou de Fidel…
« Le peuple n’a pas de nuance dans ses rejets », Carlo A. Désinor, L’Affaire Jumelle. p. 35
Je retourne autrement sur cette ancienne réflexion, après avoir été bombardé d’images concernant l’urgent voyage officiellement humanitaire d’un dignitaire national planétairement connu.
En République Dominicaine, jusque vers le milieu des années 90, l’ombre relativement bienveillante de deux descendants de catalans dominait l’alphabet idéologique: Joaquín Balaguer et Juan Bosch. Entre-temps, certains «disciples» ont maitrisé la marche des affaires à un point si impressionnant que le Benefactor Rafael Trujillo lui-même aurait bien voulu prendre quelques petites leçons…
La vraie vie politique et économique, la vie tout court et le vrai compañerismo dans notre Caraibe permettent de saisir, qu’au niveau de la «raison d’Etat», Balaguer, Duvalier et Castro ont les mêmes réflexes. On ne discute pas avec ces hommes-là! Toutefois en majuscule, il existe une différence coriace: Balaguer et Castro ont eu un pacte secret avec leurs élites respectives, ou viceversa. Les princes ne passeront pas leur existence à broyer, inutilement, des milliers de vies, sans laisser du solide. Cela me rappelle le conseil de Serrano Suñer à son beaufrère, Francisco Franco: «Laisser quelques pierres aide beaucoup à ce que l’Histoire garde la mémoire d’un personnage».
Lorsque Balaguer se mit à construire, les masses parlèrent d’exagération; une fois Balaguer en dehors du palais, ces mêmes prétendirent qu’il n’avait pas assez construit! Duvalier, souvent, nous donne l’impression, paralysante impression, d’avoir été un dictateur limité. Implacablement féroce envers les adversaires directes, mais saisissant, à peine, le jugement de l’histoire; sachant que l’histoire d’Haiti reste d’une sévérité écrasante. Et dire que Lavalas et tant d’autres n’ont adopté pour modèle que les défauts du duvaliérisme explosif et dégradant. L’on se rappelle l’oraison funèbre magistrale de Michel Lamartinière Honorat par le Professeur Daniel Supplice, le 16 septembre 2014 : «[…] et finalement, si tu croises Yves Massillon demande lui de te remettre le Drapeau national qui aurait dû recouvrir ton cercueil ce matin. […] Dis à François Duvalier que sa révolution a échoué et que ce qui reste de la classe moyenne patauge dans une misère empreinte d’indifférence, de traîtrise et de lâcheté. Dis-lui aussi que les morts inutiles de tous les camps se demandent pourquoi?».
On fusilla, on fusille encore et il semble qu’on s’est mis à croire les fusillades sont l’unique issue. Une sorte de répétion d’un François Duvalier se rendant chaque après-midi à Fort Dimanche pour massacrer des gendarmes, politiquement liquidés par une cour martiale abracadabrante!
Ne constatons-nous pas, Fidel a préparé l’après Raul; Bosch et Balaguer ont remis un pays à Leonel Fernández. Luis Rodolfo Abinader Corona évolue sur du solide. Avec une économie remarquablement fortifiée par les bêtises haïtiennes.
L’après Duvalier symbolise une transformation radicale des leaders en pilotes; sans escale, c’est à dire en plein vol, ils piaffent d’un avion à un autre, en riant sur le dos des masses mobilisées dans les rues depuis plus de 30 ans ou, crevant dans les petites embarcations et, aussi, au-delà de la frontière haitiano-dominicaine. La connerie haïtienne s’est élevée au rang de doctrine! Mes gouvernements, depuis l’après-Duvalier frôlent l’informel. Washington leur délivre un certificat d’aptitude pour mineurs, absolument différent que celui que détiennent les successeurs de Fidel et ceux de Balaguer.
Pourtant, nous avons appris à marcher bien avant eux!
Hélas, notre désarmante négritude de corridors est devenue une inqualifiable imposture! Ce n’est certainement pas, pour demain la fin de nos errances suicidaires, mais faudra commencer à envisager l’arrêt d’une inconfortable marche arrière institutionnalisée.
Gilbert Mervilus, 23 octobre 2015 & 25 juin 2021