La question militaire haïtienne est toujours complexe… (F.A.d’H. 10)
Il est souvent difficile, presqu’impossible de cerner froidement, certaines personnalités majeures de l’histoire militaire d’Haiti. Dans le cas du jour, c’est l’extrême facilité avec laquelle deux ou trois individus décident que celui-ci disparaitra de la mémoire collective ou cet autre là sera classé comme «imbécile». Bizarres, nos préjugés, lesquels masquent, toujours, de lourdes grandes vérités, entre l’ancienne lutte des classes et l’actuel combat, féroce et sophistiqué, pour les places.
Le général Jacques Gracia (année de naissance inconnue-avril 1985, d’après le NYTimes), «incarnant la fidélité absolue» (Raymond Dumas), est un cas. En marge de nos discussions, débats et déchirures, admettons sagement, dès qu’on associe le mot «armée» à un groupe d’haïtiens une incroyable quantité de microscopes spécialisés se déchainent… Les officiers-académiciens, c’est à dire formés à l’Académie Militaire, auraient fait courir d’étranges blagues sur cet aîné, sorti des rangs.
Souligons qu’il s’agissait d’abord d’une troublante époque dramatique, celle dans laquelle évolua ce chef de la Garde Présidentielle….
«Par la mise à la retraite forcée de certains officiers et la réaffectation d’autres, le président Duvalier a en outre assuré son contrôle sur l’establishment militaire, principal instrument du pouvoir politique en Haïti. Bien que le corps des officiers dans son ensemble ressente presque certainement sa technique de diviser pour régner, il a mis dans les positions clés des hommes sur lesquels il s’appuie. Le général Merceron, le commandant de l’armée, est fortement contrarié par l’influence grandissante du major Raymond, commandant de la Garde présidentielle, mais n’a pas été capable de l’endiguer».
Source:FOREIGN RELATIONS OF THE UNITED STATES, 1961–1963, VOLUME XII, AMERICAN REPUBLICS.(Administration du président John Fitzgerald Kennedy, 20 janvier 1961–22 Novembre 22 1963)
«Les officiers de l’armée haïtienne en exil ont été soigneusement examinés et sélectionnés pour une reconstruction rapide de l’armée haïtienne dans le sens des intérêts américains». Source: Memorandum Prepared for the 303 Committee/1/ Washington, June 2, 1965. V. Preparations for New Regime (Administration du président Lyndon B. Johnson, 22 Novembre 22 1963–20 janvier 1969)
«Pendant l’occupation d’Haïti (1915–1934), les Marines ont créé une armée polyvalente conçue à l’origine pour combattre les Cacos, groupe d’insurgés paysans. L’armée est composée d’une force de gendarmerie nationale avec la petite garde côtière et l’ aviation en tant que branches subordonnées, lesquelles ne sont ni importantes militairement ni politiquement. Le pays est divisé administrativement en neuf départements militaires. Les trois départements de Port-au-Prince constitués par la Garde Présidentielle, le Bataillon Dessalines et la Police de Port-au-Prince, directement sous le contrôle du Président. Les départements sont subdivisés en districts, sous-districts et sections. La force du personnel d’un département militaire est à peu près équivalente à celle d’un bataillon américain». (Administration du président Richard NIXON, 20 janvier 1969–9 août 1974)
Léopold Sédar Senghor est de passage à Port-au-Prince en février 1976. L’homme d’Etat sénégalais fut surpris par la quantité de citoyens qui pissaient, à travers les rues. Lorsqu’il se renseigna auprès du général Jacques Gracia, autour de l’absence d’urinoir [qui sonne « du riz noir…»], l’officier lui aurait expliqué que nous ne consommions que le riz blanc!
«D’aucuns pensaient et pensent encore que Jacques Gracia fut un illettré et un vendu de l’Armée. Au contraire, cet homme fut un stratège hors-pair et clerc de profession. En tant que lieutenant ou simple officier, il était à cette époque responsable des correspondances entre les officiers supérieurs et le Haut État-major. D’où ses connaissances de la bonne marche de l’Armée et de ses secrets. De parents beaucoup plus pauvres que ceux de François Duvalier, ils habitaient, parait-il, le même quartier. Jacques Gracia rentra dans les rangs, et Duvalier en médecine. Ils s’étaient rencontrés plusieurs années plus tard lors de la campagne de Duvalier à Grand-Rivière du Nord ». Saint-John Kauss
«Si Jacques Gracia tue Hilaire, il deviendrait président par interim D’Haïti»…L’intermédiaire doit exposer le complot à Jacques Gracia (commandant Garde Présidentielle) , y compris le plan de Jean-Baptiste Hilaire (chef d’état-major) de le faire tuer, et offrir à Jacques Gracia la chance de tuer Hilaire en premier. Jacques deviendrait alors président par intérim d’Haïti. Source: Telegram 36580 From the Department of State to the Embassy in Haiti (Administration du président Gérald Ford, 9 août 1974–20 janvier 1977)
Gilbert Mervilus, 24 mai 2020
Notes: 15 Décembre 1958, François Duvalier élimine la Maison Militaire et rétablit la Garde Présidentielle, bataillon de 450 hommes, lequel reçoit ses ordres directement du président. Le premier commandant de la Garde Présidentielle est le major Claude Raymond. Dans le cas du général Jacques Gracia, souvent on inversait le nom, à la place du prénom. Nous avons respecté leur place, tq se présentent dans les sources mentionnées.
Textes antérieurs: Le commandant des Cadets… (F.A.d’H., 9) https://medium.com/@gilbertmervilus/le-commandant-des-cadets-f-a-dh-9-28c977d861f8?