Le maestro Nemours Jean-Baptiste et ses «Fils» …

Don Gilberto
4 min readJul 27, 2020

Le 25 juillet 2016, Lionel Jean-Baptiste me fit relire une brève note, concernant le décès (29 décembre 2005) du « premier chanteur du compas direct », Julien Paul. Cette visite m’aida à créer ma propre définition du compas : «l’unique chose nationale partout acceptée, sans discussion»! Et, dont toute tentative de débat autour de la paternité fait volcaniquement jaillir, tous ceux qui « moururent dans l’oubli et dans l’indifférence des uns et des autres» (Louis-Charles, page 20)

A l’époque où Port-au-Prince paraissait une belle capitale, avec ses enseignes lumineuses, au centre-ville, et quelques élégants magasins, sans dimension ni prétention globalisante, quelques bons samaritains organisèrent une collecte solidaire, sur Radio Métropole, pour essayer de sauver la vue du maestro Nemours Jean-Baptiste (2 février 1918–18 mai 1985). Ils souhaitaient organiser son voyage, pour subir une délicate opération ophtalmologique, dans une clinique catalane spécialisée.

A dix minutes de marche de Métropole, se trouvait le magasin (Continental Trading) de monsieur Emmanuel Ambroise, alors représentant de la marque Pioneer. C’est là que je touchai, pour la première fois, un lourd et beau saxophone. Vers le milieu du secondaire, début années 80, à deux ou trois reprises, la vie m’avait donné en cadeau de serrer la main de l’indispensable complice de Nemours, le maestro multi-instrumentiste et saxophoniste de grande classe, Wébert Sicot (1930 — Février 1985). Sa version du «cerisier rose et pommier blanc» est une pièce de qualité originale. J’avais dû, toutefois, attendre quelques années, pour assister, dans la cour de l’ancien Institut français, aux performances du talentueux maestro Thurgot Théodat. Après le concert, j’avais la forte conviction que Thurgot est né, avec un saxophone aux lèvres!

Quelques semaines après le séisme de 2010, je me suis longuement promené aux alentours de l’église Sainte Anne. Impressionnantes ruines d’un lieu de culte, jadis célèbre; historique quartier dévasté; avec ce parfum de douloureuse sensation que les illustres lettrés, qui fréquentèrent à un moment donné, les bancs du Lycée Toussaint Louverture d’en face, décidèrent peut-être, d’effacer nuitamment, tout ce qui aurait pu émouvoir ou surprendre, les générations postérieures.

C’est dans ce secteur de notre capitale d’hier, qu’un jour de juillet du milieu des années 50, le formidable Nemours Jean-Baptiste commença à écrire cette «unique chose nationale, partout acceptée, sans discussion».
L’incroyable héritage est phénoménal. En effet, pour les uns, le compas direct serait aujourd’hui, fissuré, par les séismes d’une nature indescriptible. Néanmoins, les autres, qui osent, témérairement continuer, à interroger nos déchirures complexes et effrayantes, nos bavures et nos ruines, se permettent toujours, le luxe de rêver.

Comme pour Els Quatre Gats (Barcelone), où un jeune inconnu, exposa tout au début du siècle passé, ses premiers dessins ; Pablo Ruíz Picasso, il s’appelait, ce jeune-là; ou, plus près de nous, lorsque, de La Bodeguita del Medio, une génération d’artistes cubains se lança à la conquête du monde, le compas direct mérite un lieu de mémoire, de recueillement solidaire et de résurrection créatrice.

Gilbert Mervilus, 27/7/20

Notes: la date, généralement acceptée, est le 26 juillet 1955. Notons, toutefois,«Beaucoup pensent que c’est l’orchestre de Nemours Jean-Baptiste qui a pris naissance le 25 juillet 1955, la veille de la Sainte-Anne, et non le rythme Compas lui-même, d’autres, au contraire, pensent que cette date, le 25 juillet 1955, ramène la naissance du Compas direct. […] “Dans la tête de beaucoup de gens, le rythme compas a pris naissance le 26 juillet 1955, alors qu’on devrait le situer trois ans plus tard au commencement de l’année”. En signe de compromis, il pense qu’on est obligé finalement de s’y accommoder même s’il regrette que la date de la fête du Compas ait été choisie arbitrairement (Tony Lamothe). […] Si l’on recherche un père pour le Compas, on peut prendre Némours. Il le mérite. Mais ce dernier n’a pas inventé un rythme, il l’a adapté.
Pour conclure, nous pensons qu’on peut faire coïncider l’appellation Compas à 1955, mais pour le rythme il faut remonter beaucoup plus loin. Il ne faut pas oublier aussi que le Compas a subi au fil des ans beaucoup de transformations. Sources: mizikpeyin.blogspot.com»

Intéressants à consulter: Trujillo pagaba US$15 mil por merengues le adulaban, par José Rafael Sosa, 8 novembre 2015, El Nacional Rep.Dominicana El merengue, género de propaganda en la Era de Trujillo, par ”CYNTHIA ABRÉU, 26 abril, 2011, Hoydigital, Rep.Dominicana.

Photos:Nemours Jean-Baptiste par Hugo Valcin; Nemours Jean-Baptiste, alchetron.com

--

--

No responses yet