Haiti, 1908, At Port au Prince, President Nord Alexis coming back from a military review by carriage. (Photo by Photo12/UIG/Getty Images)

Savoir réveiller son supérieur hiérarchique pour lui annoncer l’assassinat du Président de la République

Don Gilberto

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Le Président Dartiguenave et sa Maison Militaire
Le Président Elie Lescot recoit l’Amiral Beatty, 2ème rangée, Maison militaire
Accolade entre Président Estimé et Gral Lavaud; à gauche, Paul Magloire; 2ème rangée, Maison militaire
Avril 1952, visite du président Héctor Bienvenido Trujillo Molina à Port-au-Prince
Le Président à vie François Duvalier attend Haile Selassie , 24 avril 1966
Il ne fréquenta pas l’Académie Militaire, le général Gracia Jacques fut une Académie. L’unique à avoir dirigé le premier bataillon d’élite, le poste numéro un, la Garde Présidentielle, pendant presqu’un quart de siècle.G.M.
Le Président à vie JCDuvalier recoit les honneurs de la Garde Présidentielle. Observez son pistolet…
Président Jovenel Moise (avec l’USP), Inauguration Day, Toronto Star
L’USGPN

Lorsqu’à 5h43 ce lourd mercredi matin, je décide d’appeler mon chef, deux radios au moins ont déjà confirmé le drame: Caraïbes et Méga.

En prenant mon premier café et sachant que mon chef serait debout à l’heure des évaluations de nos rues par Mackenson Remy, le journaliste surnommé «4×4», je me suis mis à penser dans le plus beau désordre à ce que nous appelons abusivement la sécurité «présidentielle», cette planète si éloignée de notre vraie vie quotidienne. J’ai commencé à faire des recherches dans ce domaine en 1995. Le 10 janvier 1995, date de la première visite officielle à Cité Soleil du président JBAristide depuis son retour, le 15 octobre 1994. Dès 3h du matin ce 10 janvier, il était pratiquement impossible à une fourmi de s’infiltrer sur un rayon incroyablement large, entre le Portail Saint-Joseph et Damiens.

La création de la Gendarmerie d’Haïti, suite à l’accord haitiano-américain du 24 août 1916, modifie l’allure et la composition de la sécurité présidentielle. De cette époque, jusqu’à l’haitianisation de la Garde, le 1er août 1934, des officiers américains se trouvent à la Maison militaire présidentielle (Le Moniteur 25 oct. 1928, no.87). De 1934 à 1958, de remarquables officiers haïtiens se distinguent à cette Maison militaire. Le 15 Décembre 1958, le président François Duvalier élimine la Maison Militaire, chargée du palais et de ses prestigieux locataires. La Garde Présidentielle (GP), bataillon de 450 hommes (25 officiers) est créée. Cette entité militaire suréquipée et indépendante reçoit ses ordres directement du président. Le premier commandant de la Garde Présidentielle fut le capitaine Claude Raymond. Rappelons ce passage d’un ouvrage du major Gérard Dalvius, « un lieutenant de la Garde Présidentielle a beaucoup plus de pouvoir qu’un colonel du Grand Quartier général »…

Un jour de l’après séisme (12 janvier 2010), j’ai demandé à un ami, ancien officier de la GP, quid des archives du Palais ? Il m’expliqua, avec l’originale patience d’un témoin de grandes secousses, qu’au district militaire no. 1, la Garde Présidentielle, 95 % de la procédure et du fonctionnement administratifs dépendaient de l’oraliture, impressionnante et déroutante, du premier magistrat. Comme au 19ème siècle, le président le veut, il le faut. Tribaliture et marronage exigeaient ce comportement . Aucune trace écrite d’une bonne partie de l’arsenal. L’efficacité et une supposée supériorité du renseignement s’asseyaient d’abord sur la crainte du coup de langue.

En grande et bonne compagnie à La Havane en 1991, un proche de la sécurité de Fidel, après m’avoir sagement écouté, me dit en souriant «[…] si tu as vécu toutes ces choses, c’est que tu fais partie du cortège; peut-être sans le savoir, car le bouclage du premier cercle est une science». Certes, au temps du général Gracia Jacques, nous avions l’impression -certainement étrange- que presque chaque citoyen avait un représentant à la Garde Présidentielle (GP). En avril 1989, suite à un affrontement dominé par la confusion, la GP format duvaliérien s’efface…

A partir de 1995, la création de l’U.S.G.P.N. (Unité de la Sécurité Générale du Palais National; commandant major Joseph Médard ) et de l’U.S.P. (Unité de la Sécurité Présidentielle; dirigée par le colonel-Dr.Fourel Célestin) marque une autre étape dans l’histoire de la sécurité présidentielle haitienne. Signalons en avril 2013, l’U.S.G.P.N. & l’U.S.P. se distinguèrent, efficacement au Caribe Convention Center. Un joint force sous le commandement conjoint de l’inspecteur général Jean-Jacques Nau et du divisionnaire Bernard Elie, reçut 6 présidents et une incroyable quantité de ministres étrangers (Sommet Association Etats Caraïbe).

Le président Aristide à l’occasion de son retour en Haïti (Photo de David Turnley/Corbis/VCG via Getty Images

L’USGPN & l’USP sont nées en des conjonctures fort complexes, sous le parapluie bien ouvert sur la pelouse du Palais haïtien de l’Armée américaine et des Nations-Unies. En fait, la cour du Palais et toutes ses chaises s’internationalisaient dangereusement. Rappelons le lundi 23 juillet 1973, entre 2h45 et 3h25 am, le chef d’état-major des F.A.d’H. (Claude Raymond), le président JCDuvalier et le ministre des affaires étrangères (Adrien Raymond) durent téléphoner à la base navale de Guantanamo pour demander de l’aide afin d’éteindre l’incendie survenu à l’arsenal du Palais National d’Haïti.

Après avoir formulé un bonjour spécial à mon supérieur hiérarchique , il m’apprit que ses enfants venaient de le réveiller pour lui apprendre la terrible nouvelle.

Gilbert Mervilus, 8 juillet 2021

(Extrait de Sans «autorisation»: le chef FF)

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