Dominique Wagner, fille ainée de Madame Gladys Rouzier Wagner; photo G.M.
Anghelen Arrington Philipps; coll. Dominique Wagner

Visiter Turgeau et le Bois-Verna, autrement

Don Gilberto
5 min readAug 5, 2020

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Pour Dominique, et nos conversations qui traversent tant de calendriers

En prenant mes premières notes sur Turgeau, à partir de 2010, j’ai pensé à Villefranche (construit fin 50, début 60) et Malval (1976). Ces anciennes impasses portent le nom des propriétaires de l’unique grande maison qui existait avant le lotissement. Par je ne sais quel manque d’information ou paresse, quelqu’un a même prolongé la rue Malval jusque vers Casséus, entrée Pacot.

Quant à l’ancien Bois-Verna, vous êtes passé, sans peut- être le savoir, sur le trottoir des résidences (respectives), des présidents Tancrède Auguste ( 9 août1912–2 mai 1913) et Sudre Dartiguenave (12 août 1915–15 mai 1922). L’ancien bureau politique de Louis Déjoie père, au cours de la tourmentée campagne de 1957, reste d’une captivante fraîcheur. Visiter le perron, la veranda, le garage, les jardins; la cour d’entrée et la cour arrière; dans certains cas, les cours latérales, constituent un exercice instructif. A l’intérieur, une distribution encore plus attrayante: salon, salle à manger; parfois bureau/bibliothèque; salle de bain, chambres à coucher à l’étage, entre balcons et terrasse; et même grenier, dans certains cas.

Une petite promenade bibliographique entre Moreau de Saint-Rémy et David Patrick Geggus m’a permis de faire connaissance avec le personnage Thomas Guillaume Laroque-Turgeau, capitaine de Dragons, chevalier de l’Ordre royal et militaire de Saint-Louis, ancien commandant de Saint-Jean de Tiburon, en 1793. D’après Geggus, vers 1791, «Guillaume Laroque-Turgeau résidait depuis longtemps dans la colonie».

Malgré la sous-exploitation de nos archives paroissiales, de Villa Manrèse à l’Institution des Sœurs du Sacré-Cœur, les notes consacrées à Turgeau et particulièrement à présence catholique, sont d’intérêt : « […] C’est à Turgeau, qu’au lendemain de l’Indépendance nationale, en sa qualité de préfet apostolique, le père Guillaume Lecun intercéda auprès de Jean-Jacques Dessalines, pour les familles françaises qui cherchaient à fuir le pays » (Mgr Guire Poulard ). De J.C. Dorsainvil, nous lisons, « Après une série de combats à Santo, Damiens, Sarthe, Chancerelle, et Bizoton, le siège de la ville commença. Dessalines établit son quartier général à Turgeau. […] Le 11 octobre 1803, l’armée indigène entra à Port-au-Prince par les portes de Turgeau, Montbalais et Saint-Joseph».

Anghelen Arrington Philipps; coll. Dominique Wagner

«Au delà des limites du centre-ville historique [1749], l’image se modifie; la densité diminue. Les nouveaux quartiers résidentiels de l’époque (1850–1900), Lalue, Bois-Verna, Turgeau accueillent des maisons d’habitation d’un style nouveau. Entre cour et jardin, cette maison est un mélange éclectique européen savamment “ tropicalisé “, avec ses galeries en bois ornées de frises et de dentelles; le style est connu sous le nom de “ gingerbread “, ou “ pain d’épice “. Les rues de ces quartiers sont protégées par l’ombre que projettent les arbres fruitiers qui ornent les jardins; la nuit, l’atmosphère est embaumée par le parfum des Ilan-Ilans. […], Ces premiers “ nouveaux quartiers “ (Lalue, Bois-Verna, Turgeau) agrémentés d’espaces verts offrent un caractère plus poétique, moins rigide que la ville coloniale planifiée». Bulletin Ispan №6, Novembre 2009

Maison Président Salomon, Turgeau,Collection CIDIHCA

«[…]Depuis longues années on n’avait vu un homme politique militant, surtout au pouvoir, acquérir et bâtir. Le président Salomon l’entreprenait à Turgeau, mais tout le monde n’est pas le président Salomon;[…] Le lendemain, au réveil, chaque villa s’abritait sous un drapeau. Depuis les drapeaux français et allemands jusqu’à l’étendard de la plus infime république des deux mondes, la colline de Turgeau était pavoisée du haut en bas. Je ne compte pas les consulats, dans la ville même, couverts de leurs couleurs. Je n’aurais jamais cru qu’une ville comme Port-au-Prince pût contenir tant de consuls. C’est une petite monomanie que les commerçants de Port-au-Prince feront bien de soigner, s’ils veulent que l’institution ne perde pas de sa gravité (DÉLEAGE ,Page 143)»

Paroisse Saint-Louis, photo G.M.

Signalons, en complément de la note du Sacré-Cœur, les familles qui contribuèrent à concrétiser le premier agrandissement de la chapelle de Saint-Louis roi de France(bâtiment de 1879): de Lespinasse, Wiener, Phipps, Baussan, Boucard, Rouzier, Mc Donald . Vers les années 40, Mme. Mac Donald, habitant à la ruelle Berne et dont le mari représentait Panama Lines en Haïti, fit venir de Panama City, une belle statue de la Vierge pour la chapelle.

Pendant la révolution en 1791,«Les mulâtres rompirent les tuyaux de fonte à la source de Turgeau»(J. Grouvel, Faits historiques sur Saint-Domingue). Sous la présidence de Fabre Geffrard (1859–67), le gouvernement modernisa la tuyauterie qui amenait en ville l’eau de Turgeau (Ledan fils). D’après B.Ardouin (1854), « la source Turgeau fournit l’eau aux fontaines du Port-au-Prince».

A suivre…

Gilbert Mervilus, 5–8–2020

Notes:« HAITI EN 1886 » par PAUL DÉLEAGE, E.DENTU ÉDITEUR, Paris 1887.

Gaylord Esper a r c h i t e c t e, in Roberto Stephenson, Port-au-Prince, 2004.

Histoire et généalogie des Landry, Base de données sur les Acadiens de 1640 à 1760, ID I43578.

J.C. Dorsinvil, Histoire d’Haïti

Le Nouvelliste — Mgr Guire Poulard : le sauvetage de l’ancienne cathédrale

Bibliothèque numérique des Caraïbes, University Of Florida Library.

Dans le Calendrier des princes et de la noblesse de France, Etrennes de la noblesse, correspondant à l’année 1771, page 83, il est mentionné «Saint-Turgeau» faisant partie des terres patrimoniales de la branche ainée des marquis de Curton. Le chef de la famille de Chabannes porte le titre de marquis de Curton depuis 1563. Wikipédia

Photo de la source antérieure à 1905…

26 mars 1920: Loi érigeant le quartier de Turgeau et ses environs en paroisse (Dartiguenave/Bellegarde).

Arrêté déclant d’utilité publique quelques quinze(15) sources d’eau. Le Moniteur 8 octobre 1992.

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