Qui s’occupe de la santé et de la sécurité de nos médecins ?

Don Gilberto
3 min readJun 2, 2021

Dans une des premières éditions de l’Instruction civique d’Odette Roy Fombrun, ma génération fit connaissance avec le docteur Dantès Destouches (1862–1912). Nous apprîmes qu’il donna toutes ses économies -200 gourdes d’hier- à une connaissance qui en avait urgemment besoin pour une intervention ophtalmologique.

En 1938, Le Nouvelliste s’inquiétait de la presque disparition des médecins philanthropes : « Une douzaine luttent encore dans notre milieu, dépaysés, désorientés et désamparés…».[1] Rien que pour la capitale, aucun historien n’a encore cherché à établir l’impressionnante liste des médecins philanthropes. L’occupation militaire de 1915–34 bouleversa énormément notre société. Vinrent ensuite des révolutions particulières de l’après 1934. L’épiderme des clans finira par donner une « couleur » aux évènements (Ch. Dupuy, L’affaire Calixte).

Avant-hier, je racontais à une dame de l’administration de Saint François de Sales ma presque contrariété pour n’avoir pas eu le temps de photographier les marbres majestueux dédiés au docteur Paul Salomon, philanthrope et figure monumentale de la formation médicale au début du vingtième siècle. [2]

A la fin de la décennie 80, une rencontre est organisée à l’ancien ministère de l’Intérieur (Palais des Ministères emporté le 12/1/2010). Le titulaire, un officier aguerri et considéré numéro deux (2) du gouvernement, essaie de poser, avec toutes les associations professionnelles, le naissant problème de l’insécurité. Un médecin de l’assistance confirme le début de la disparition du service de nuit des pharmacies, par quartier. Et, le même professionnel surligne les difficultés souvent affrontés par la plupart des médecins qui osent se déplacer la nuit. Entre temps, sur le plan démographique, les prévisions d’Albert Mangonès et de Georges Anglade concernant notre capitale se concrétisent lentement. Port-au Prince est devenue une bombe !Avec l’assassinat spectaculaire du docteur Jimmy Lalanne en sa clinique (27 février 1999) et celui du docteur Ary Bordes, au volant de sa voiture, le 6 mai 2000, la collectivité est profondément secouée.

Traditionnellement, la résidence, la clinique et le véhicule d’un médecin constituaient des sanctuaires sacrés, avec aussi dimension d’ambassade. L’on se rappelle la galerie d’entrée à la clinique des docteurs

Georges Métellus, André Bolière, Ulrick Rosarion, Martelly Séide. Malgré la complexité de nos anciennes conjonctures, tout le monde arrangeait son pistolet lorsqu’on se trouvait dans le voisinage des cliniques ou espaces hospitaliers. Imaginons un instant une nouvelle discipline dans nos facultés : l’art de bien tenir le stéthoscope et le pistolet ! Ce savoir-faire devrait certainement concerner toute la structure autour du médecin, considérant le niveau élevé de nos spécialistes en insécurité. Finalement, toutes palabres cessantes, et si le médecin décidait d’appliquer à l’envers sa science pour protéger sa vie, la vie…?

Gilbert Mervilus, 11 mai 2021

RÉFÉRENCES : 1- Les grandes figures médicales haïtiennes, Dr. Paul Vatinelle, Le Nouvelliste 27 juillet 1938

2- Le Nouvelliste, 29 Juin 1945, 50 ans de carrière du Dr. Paul Salomon

Article paru dans Vol 1 Numéro 6 INFO GAZETTE MÉDICALE, page 10

Article antérieur:Comment allez-vous… ? https://gilbertmervilus.medium.com/comment-allez-vous-856ec3d6e7cf

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